Une communauté métisse dévastée craint d’autres feux de forêt en Alberta

Une petite communauté métisse de l’Alberta reste sur le qui-vive en raison des violents incendies de forêt qui ravagent une partie de la province, alors que les conditions chaudes et sèches prévues dans les prochains jours menacent d’aggraver une saison de feux de forêt déjà intense.

«Ce feu-là, je l’appelle le diable. Je n’ai jamais vu ça de ma vie», a lancé le président de l’Établissement métis d’East Prairie, Raymond Supernault, en entrevue avec La Presse Canadienne.

«Je n’ai jamais vu un incendie venir aussi vite et brûler tout sur son passage», a-t-il souligné.

Dans cette petite communauté située à environ 165 kilomètres à l’est de Grande Prairie, le paysage est apocalyptique: le sol est noir et carbonisé, les poteaux électriques ressemblent à des allumettes et 14 maisons ont été détruites.

Environ 80 % de la communauté a été touchée par l’incendie d’une manière ou d’une autre. Les pertes sont immenses pour ce village d’environ 300 personnes, a mentionné M. Supernault.

Les photos de famille, les objets d’une grande valeur sentimentale et une partie importante de l’histoire des familles métisses ont été réduits en cendres. Un pont, dont certaines familles ont besoin pour rentrer chez elles, a également été détruit par le feu.

La communauté n’est toutefois pas encore sortie d’affaire. Des températures oscillant entre les 20 °C et 30 °C sont attendues dans certaines régions au cours des prochains jours. Le mercure pourrait même se situer 15 °C au-dessus de la normale saisonnière à quelques endroits.

«Ça va être chaud. Les incendies vont recommencer. C’est ce qui me fait le plus peur», a reconnu M. Supernault.

Il y avait 74 incendies de forêt actifs en Alberta vers midi vendredi, dont 20 hors de contrôle.

L’armée en renfort

Vendredi, la première ministre de l’Alberta, Danielle Smith, était à Grande Prairie pour inspecter la zone d’incendie et rencontrer des responsables locaux et des dirigeants autochtones.

Environ 300 membres des Forces armées canadiennes sont déployés pour aider à combattre les flammes au cours des prochains jours. Environ 100 de ces soldats seront envoyés dans la région de Grande Prairie, dont à l’Établissement métis d’East Prairie.

Cette aide supplémentaire offrira un répit aux membres de la communauté, qui ne l’ont pas eu facile lorsque l’incendie majeur de la semaine dernière s’est approché.

Les gens ont eu à peine une heure pour fuir. Selon M. Supernault, il n’a fallu que sept heures au brasier pour tout réduire en poussière.

Un état d’urgence provincial a été mis en place le lendemain.

«Je n’aurais jamais pensé voir quelque chose comme ça de mon vivant», a affirmé M. Supernault.

Une communauté résiliente

Certains membres de la communauté sont restés sur place pour sauver ce qu’ils pouvaient. En effet, ce n’était pas leur premier rodéo, selon M. Supernault.

«Nous avons tous combattu le feu en grandissant, c’était notre source de travail», a mentionné de son côté Brad Desjarlais, qui est resté sur place pour aider.

Les épinettes, les peupliers et l’herbe sèche se sont enflammés rapidement, alors que les habitants faisaient ce qu’ils pouvaient pour éloigner les flammes des maisons, a expliqué M. Desjarlais.

Une petite quantité de pluie cette semaine a aidé leurs efforts, mais certains points chauds n’ont pas bronché.

Le gouvernement de l’Alberta a annoncé qu’il se joindra au gouvernement fédéral dans un programme de dons avec la Croix-Rouge canadienne. Ainsi, chaque dollar versé à ce fond par les Canadiens équivaudra à 3 $.

Selon M. Supernault, il est souvent difficile pour l’établissement métis de gérer les problèmes de compétence entre la province et le gouvernement fédéral lorsqu’il s’agit d’obtenir de l’aide et du financement.

Ils devront maintenant reconstruire des maisons, installer des poteaux électriques et réparer le pont, le tout à un prix important.

East Prairie est l’un des huit établissements métis de la province. Il est autonome, mais n’est pas exactement une réserve des Premières Nations.

Malgré tout, la communauté compte tout reconstruire, par respect pour ses ancêtres qui ont établi leur résidence permanente sur cette terre dans les années 1930.

«Ils l’ont construit pour nous et nous devons nous assurer d’en prendre soin», a conclu M. Supernault.