Réforme Dubé en santé: les dons aux fondations ont déjà diminué, déplore le PLQ

QUÉBEC — La réforme Dubé en santé n’est pas encore adoptée qu’elle entraîne déjà une diminution des dons aux fondations, selon le Parti libéral du Québec (PLQ). Cette réforme est d’ailleurs fortement critiquée par six anciens premiers ministres.

Lucien Bouchard, Pauline Marois, Jean Charest, Pierre Marc Johnson, Daniel Johnson et Philippe Couillard demandent au gouvernement caquiste de ne pas abolir les conseils d’administration des établissements.

Ils le mettent en garde contre le risque de perdre d’importants dons en écartant les conseils d’administration. Parmi les critiques soulevées, on parle d’un risque de perte d’identité des établissements pouvant affaiblir leur capacité à intéresser les donateurs. 

Ce financement est essentiel à la pérennité et la croissance des missions de soins de pointe, de recherche, de prévention, d’évaluation des technologies et d’enseignement, ont-ils souligné dans une lettre ouverte publiée mardi en fin de journée.

Le porte-parole libéral en santé, André Fortin, appuie leur démarche. «Nous, ce qu’on entend, c’est qu’il y a eu une diminution des dons qui ont été faits aux fondations», a-t-il signalé en point de presse, mercredi.

«Quand on envoie un signal qu’on ne sait pas exactement où l’argent va se diriger, ça amène une diminution des (…) dons. C’est ce que certaines fondations nous ont rapporté au cours des derniers mois», a-t-il relaté.

«Et ça, c’est problématique, (…) parce qu’il y a plusieurs secteurs du réseau de la santé qui sont financés par les fondations.»

Le premier ministre François Legault et son ministre de la Santé, Christian Dubé, ont tout intérêt à écouter les anciens premiers ministres, selon le chef du Parti québécois (PQ), Paul St-Pierre Plamondon.

«On est témoin de quelque chose d’inusité, voire historique. Je ne me souviens pas d’un moment où six ex-premiers ministres sortent pour empêcher une décision du gouvernement, pour demander au gouvernement de ne pas faire une erreur», a-t-il souligné.

Québec solidaire (QS) encourage également le gouvernement à adopter «une réelle approche de décentralisation pour que les organismes et les établissements sur place aient des pouvoirs et des compétences relatives à leurs bassins populationnels».

Dubé a déposé des amendements… et n’ira pas plus loin

À son arrivée à l’Assemblée nationale mercredi, M. Dubé a plutôt tenu la ligne dure en indiquant qu’il n’était pas prêt à faire plus de concessions.

La veille, il avait déposé des amendements à son projet de loi 15 qui ramenaient les conseils d’administration au sein des établissements, mais limitaient leurs pouvoirs.

Selon sa vision, une nouvelle société d’État, Santé Québec, aurait le mandat d’assurer la coordination et le déploiement des meilleures pratiques dans l’ensemble du réseau de la santé. 

De leur côté, les nouveaux conseils d’administration d’établissement géreraient les activités d’enseignement, de recherche et d’innovation dans leurs installations. Les dossiers liés à la philanthropie seraient plutôt confiés aux présidents-directeurs généraux avec l’appui d’une fondation liée à l’établissement.

M. Dubé a défendu son choix de limiter les pouvoirs des conseils d’administration en parlant de la nécessité de mettre fin à la gestion en vase clos, malgré l’insatisfaction des six ex-premiers ministres.

«J’ai beaucoup de respect pour le poste de premier ministre, parce que ces gens-là ont une expérience», a-t-il affirmé en mêlée de presse, avant d’enchaîner: «Moi non plus, je ne suis pas toujours satisfait et je dois vivre avec ça.»

Sa collègue, la ministre de l’Habitation France-Élaine Duranceau, qui a déjà siégé sur le conseil d’administration du CHU Sainte-Justine, s’est dite d’accord avec les «aménagements» apportés au projet de loi 15.

«On veut conserver l’expertise, les talents et surtout les sources de financement que la fondation permet d’aller chercher, et je pense que les modifications qui sont proposées (…) visent ça», a-t-elle déclaré en impromptu de presse.

Mme Duranceau ne «pense pas» que les institutions vont perdre leur âme, comme l’a prédit l’ex-premier ministre Lucien Bouchard en entrevue mercredi au 98,5 FM. «Ce n’est pas l’objectif du tout», assure-t-elle.

Résistance dans le réseau, dit Legault

Plus tard, lors de la période des questions, le premier ministre François Legault a continué d’appuyer sans réserve son ministre de la Santé. Il a évoqué la «résistance» au changement dans le réseau.

«Ça prend beaucoup de courage pour changer le réseau de la santé, a-t-il déclaré. Il y a de la résistance entre autres dans les conseils d’administration des institutions et les centres universitaires où on veut garder son petit pouvoir.

«Ce qui est proposé par Christian, ça permet de protéger l’argent qui est ramassé par la recherche. (…) Mais on veut absolument aussi protéger le pouvoir du ministère de la Santé, éventuellement de Santé Québec, de coordonner», a-t-il ajouté en mêlée de presse.