Budget 2023-2024: le ministre Eric Girard concrétise la baisse d’impôt

QUÉBEC — Près de 5 millions de Québécois bénéficieront cette année d’une baisse d’impôt, annonce le ministre des Finances, Eric Girard, qui concrétise une promesse électorale.

M. Girard a présenté, mardi, son budget 2023-2024, dont la mesure phare est une baisse des deux premiers paliers d’imposition de 1 point de pourcentage.

Précisément, le budget prévoit que les revenus de moins de 49 275 $, imposés à hauteur de 15 %, le seront à 14 % en 2023; les revenus de 49 275 $ à 98 540 $, imposés à hauteur de 20 %, le seront à 19 %.

À titre d’exemple, un Québécois gagnant 60 000 $ aura une baisse d’impôt de 428 $. À 100 000 $ de revenu, la baisse d’impôt atteindra 814 $ pour une personne vivant seule.

Un couple dont chaque conjoint a un revenu de 100 000 $ aura droit à une baisse d’impôt de 1627 $. 

La mesure, qui coûtera au trésor public 1,7 milliard $ cette année, est financée à même les versements au Fonds des générations, qui doit servir à réduire la dette.

Le ministre a justifié cette baisse d’impôt en affirmant notamment qu’elle allait stimuler la croissance économique et accroître l’offre de travail.

«La baisse d’impôt est totalement cohérente avec le nouvel objectif de réduction de dette (…): 30 % de dette nette par rapport au PIB d’ici 15 ans» au lieu de 10 ans, a-t-il ajouté en conférence de presse.

Mais ce qui risque d’être fort populaire auprès des Québécois a été critiqué mardi par plusieurs groupes, notamment les partis d’opposition, qui soulignent que la baisse d’impôt ne profite pas aux moins nantis.

«Je pense que l’idée, c’est de soutenir ceux qui en ont le plus besoin», a déclaré le porte-parole libéral en matière de finances, Frédéric Beauchemin, qui aurait préféré une baisse d’impôt plus «ciblée».

Le budget qui s’intitule «Un Québec engagé» devrait plutôt s’appeler «Un gouvernement irresponsable», a pour sa part dénoncé le député Haroun Bouazzi, de Québec solidaire.

Le parti souhaitait plus d’investissements dans les services publics.

Plus d’argent en santé et en éducation

Or, le budget prévoit des investissements additionnels de près de 5,6 milliards $ en santé, et de 2,3 milliards $ en éducation, sur un horizon de cinq ans. 

Le ministre de la Santé obtient notamment 60 millions $ sur deux ans pour créer l’agence Santé Québec, qui devrait s’occuper des opérations dans le réseau de la santé.

Le ministère de la Santé serait désormais, lui, appelé à réfléchir aux grandes orientations, selon la vision déjà exprimée par Christian Dubé et qui fera l’objet d’un projet de loi.

Le gouvernement a récemment laissé entendre dans les médias qu’il cherchait à embaucher des «top guns» à Santé Québec. 

En outre, plus de 710 millions $ sont prévus pour ouvrir de nouvelles cliniques d’accès à la première ligne et ajouter des infirmières praticiennes spécialisées.

Ces investissements permettront aussi le développement de la plateforme «Votre santé» visant à faciliter la prise de rendez-vous.

Pour les personnes aînées, le gouvernement débloque 963 millions $ sur cinq ans afin d’intensifier l’offre de services de soutien à domicile.

Et il investit plusieurs centaines de millions pour réduire l’attente pour les chirurgies, en plus de «pérenniser» les centres de vaccination et de dépistage mis en place durant la pandémie de COVID-19.

En décembre dernier, 20 649 patients étaient en attente d’une chirurgie depuis plus d’un an. L’objectif est de ramener ce nombre à moins de 3000 patients en attente d’une chirurgie en 2024.

Le Québec aura dépensé 5 milliards $ en 2022-2023 pour répondre à la crise sanitaire, pour un total de 28 milliards $ depuis 2020, si l’on prend en compte les sommes prévues jusqu’en 2025.

Parmi les autres annonces en santé, 565 millions $ iront aux services sociaux d’ici cinq ans. Le gouvernement prévoit également la somme de 125 millions $ pour offrir un accès gratuit à la vaccination contre le zona. 

En éducation, des sommes supplémentaires sont prévues pour soutenir les élèves, la transformation numérique du réseau et accélérer l’entretien du parc immobilier scolaire.

«Dans le contexte d’augmentation du coût de la vie», Québec rend aussi permanente la bonification des frais de subsistance du Programme de prêts et bourses, au bénéfice d’environ 80 000 étudiants.

Mentionnons également les changements au Régime de rentes du Québec (RRQ), incluant la décision de faire passer l’âge maximal d’admissibilité à une rente de 70 à 72 ans dès le 1er janvier 2024. 

Le gouvernement consacre aussi 400 millions $ à la relance du transport collectif. C’est bien moins que les 560 millions demandés par l’ensemble des organismes, a réagi le député péquiste Joël Arseneau.

Une année de «transition»

Par ailleurs, l’année 2023 est une «transition» vers plus de stabilité, a affirmé le ministre Girard. Il s’attend à ce que la croissance économique décélère et qu’elle passe de 2,8 % en 2022 à 0,6 % en 2023.

«Une fois l’inflation maîtrisée et des conditions de crédit plus avantageuses mises en place, l’économie du Québec reprendra son élan», peut-on lire dans les documents budgétaires. 

Malgré l’incertitude économique, une récession n’est pas prévue, écrit-on noir sur blanc. 

Le déficit après versements au Fonds des générations devrait s’établir à 4 milliards $ en 2023-2024. Il sera par la suite réduit de 1 milliard $ par année jusqu’à l’atteinte de l’équilibre budgétaire en 2027-2028.

Or, le ministère des Finances a quand même élaboré deux scénarios alternatifs de prévisions économiques, l’un prévoyant une récession et l’autre, une croissance plus forte que prévu.

«Si une détérioration de la situation économique devait survenir, le recours à la provision pour éventualités intégrée au cadre financier éviterait de reporter le retour à l’équilibre budgétaire», peut-on lire dans le budget.

«À l’inverse, une amélioration de la situation économique pourrait réduire les déficits prévus, voire permettre un retour à l’équilibre budgétaire avant 2027-2028», précise-t-on.