Air Canada se défend d’avoir fait preuve de discrimination envers un député anglais

OTTAWA — Air Canada assure que son personnel a simplement suivi les procédures lorsqu’il a retenu le député britannique Mohammad Yasin pour lui poser des questions supplémentaires lors d’un voyage de parlementaires au Canada, la semaine dernière.

Le député travailliste Yasin a été interpellé à l’aéroport d’Heathrow, à Londres, alors que d’autres élus britanniques avec qui il voyageait n’ont pas subi le même traitement. 

Il aurait de nouveau été interpellé aux aéroports de Montréal et de Toronto pendant le même voyage de parlementaires.

Clive Betts, un autre député travailliste, s’est levé à la Chambre des communes cette semaine à Londres pour déplorer le fait que son collègue Yasin ait été interrogé par Air Canada et le personnel du gouvernement canadien. Il a estimé que l’incident était de nature «raciste et islamophobe».

Selon M. Betts, des employés lui auraient dit que «c’est parce qu’il s’appelle Mohammad» qu’il aurait été traité de cette façon.

Mais selon le transporteur aérien canadien, c’est une agence gouvernementale autorisée qui a déclenché des procédures de contrôle supplémentaires, avant que M. Yasin n’embarque sur son vol.

«Nous avons ensuite suivi les procédures prescrites pour ce client et, bien que cela lui ait causé un certain inconfort, pour lequel nous nous sommes excusés, le client a été autorisé à embarquer et il a pu respecter son horaire de voyage», a soutenu mercredi Air Canada dans une déclaration écrite. 

Le député Betts a déclaré que M. Yasin avait aussi reçu les excuses du secrétaire parlementaire du ministre canadien de l’Immigration — qui n’avait pas immédiatement répondu à une demande de commentaire mercredi. Les demandes de commentaires auprès de plusieurs ministères ont été transmises à l’Agence des services frontaliers du Canada.

L’agence a plus tard indiqué qu’elle ne ferait aucun commentaire sur un cas individuel, pour des raisons de confidentialité. Elle a ajouté que «tous les voyageurs, les ressortissants étrangers et ceux qui entrent au Canada de droit peuvent être soumis à une inspection secondaire».

M. Yasin était en visite au Canada la semaine dernière au sein d’une délégation de membres d’un comité parlementaire sur le logement. À l’aéroport d’Heathrow, d’abord, on lui a demandé notamment s’il portait un couteau et où il était né, bien qu’il ait déjà obtenu un visa pour entrer au Canada, a déclaré M. Betts, président du comité parlementaire. Les mêmes questions lui ont été posées à nouveau lorsque la délégation est arrivée à l’aéroport de Montréal, a-t-il déclaré.

Sur le chemin du retour vers Londres, à l’aéroport international Pearson, M. Betts a déclaré que son collègue avait de nouveau été interpellé, mais qu’il avait pu embarquer sur son vol avec l’aide du consulat britannique à Toronto.

Air Canada affirme de son côté qu’il a fourni à M. Yasin une «aide supplémentaire» pour qu’il puisse embarquer sur son vol de retour vers le Royaume-Uni.

Après les commentaires de M. Betts aux Communes, le vice-président de la Chambre, Roger Gale, a qualifié de «totalement inacceptable, quelles que soient les circonstances», le traitement réservé à M. Yasin. «C’est particulièrement préoccupant, car ça s’est produit au cours d’un voyage officiel pour des raisons parlementaires.»

Ralph Goodale, haut-commissaire du Canada au Royaume-Uni et ancien ministre de la Sécurité publique à Ottawa, a indiqué qu’il avait invité M. Yasin à la Maison du Canada à Londres pour parler de cette mésaventure.

«Les événements décrits dans les médias sont inquiétants, a déclaré M. Goodale mercredi. Personne ne devrait sentir qu’il n’est pas le bienvenu au Canada en raison de ses origines, de sa couleur de peau, de son orientation ou de sa religion.»

Le gouvernement canadien a également contacté Air Canada après avoir été informé de l’incident, a déclaré mercredi le ministre des Transports, Pablo Rodriguez, alors qu’il se rendait à la réunion hebdomadaire du caucus libéral. «Air Canada s’est excusée et c’était la bonne chose à faire», a-t-il indiqué. 

La représentante spéciale du Canada chargée de la lutte contre l’islamophobie a qualifié de «retour en arrière navrant de l’après 11 septembre» le fait qu’un député soit «empêché de monter à bord d’un vol d’Air Canada parce qu’il s’appelait Mohammad».

Commentant cette affaire sur X (anciennement Twitter), Amira Elghawaby a écrit: «Nous ne pouvons pas revenir sur une voie où des communautés sont suspectées simplement en raison de leur foi ou de leur appartenance ethnique.»