Procès Ovalle Leon: Le choc des jurisprudences

La juge Rena Émond rendra sa décision le mercredi 17 août, concernant la requête de droits sur la Charte demandée par Marie-Michèle Longchamps, l’avocate représentant Pedro-Antonio Ovalle Leon.

En effet, les avocates de la défense et de l’accusation ont présenté leurs plaidoiries le jeudi 2 juin dernier au Palais de Justice de Saint-Joseph, avec chacun un dossier riche en jurisprudences. Or, chacune des décisions antérieures sorties des tiroirs venait confirmer ou infirmer les trois points en litige, c’est-à-dire: les motifs de procéder à l’arrestation, le délai raisonnable ou non entre l’arrestation et les prélèvements sanguins, et l’importance de cet élément de preuve dans la suite des procédures.

À la défense du Guatémaltèque, Me Longchamps a soulevé qu’au moment de l’arrestation, les policiers n’avaient pas de raison de croire qu’un crime avait été commis. S’ils peuvent deviner que la vitesse est en cause, ils ignorent tout des circonstances de l’accident. Quant à la présence de cannettes de bière (pleine), à son avis, cela ne constitue pas une preuve que le taux d’alcoolémie était au-delà de la limite permise.

En ce qui a trait aux prélèvements sanguins, celui exercé par le centre médical aurait été fait alors que M. Ovalle Leon n’était pas en état de donner un consentement libre et éclairé, et ce, 52 minutes avant que les policiers lui aient lus ses droits constitutionnels.

De plus, le prélèvement demandé par les policiers a été réalisé cinq heures et 40 minutes après la mise en état d’arrestation de l’individu, alors que le délai maximum prescrit par la loi est de trois heures. « Le protocole doit être respecté pour que les résultats soient admissibles en preuve », d’indiquer l’avocate. Elle ajoute aussi que le public doit pouvoir avoir confiance envers les services hospitaliers et ne pas craindre que des renseignements personnels soient communiqués librement aux policiers.

Concernant l’importance de l’échantillon sanguin comme élément de preuve, Marie-Michèle Longchamps estime que la gravité des accusations et la fiabilité des résultats ne doivent pas prévaloir sur l’intérêt de la société, car ceci priverait les personnes accusées de crimes graves de leurs droits fondamentaux.

@ST:En réplique

@R2:Au contraire, la procureure de la couronne Audrey Roy-Cloutier rappelle que dans l’esprit des policiers, au moment des événements, l’accident n’est pas inexpliqué. Ils en comprennent les circonstances et ont d’ores et déjà constaté les yeux rouges et vitreux du suspect.

À la question sur les échantillons sanguins, Me Roy-Cloutier est d’avis que celui prélevé par les policiers en dehors du délai habituel ne le rend pas inutilisable, car des experts en laboratoire peuvent réaliser un « rétrocalcul » afin de déterminer le taux d’alcoolémie de l’accusé. L’échantillon obtenu par l’hôpital ne servirait qu’à valider ledit calcul.

Par ailleurs, il s’agit pour elle d’un élément de preuve fondamental, car sans un taux d’alcoolémie officiel, il serait impossible de prouver qu’Ovalle Leon était en état d’ébriété le 22 août 2015 et quatre des 18 chefs d’accusation tomberaient. « Ce sont des accusations très sérieuses. Deux jeunes hommes ont perdu la vie, une jeune femme a lutté longtemps pour la sienne et un autre jeune homme a été blessé gravement. Sans cette preuve, c’est l’exclusion qui minerait la confiance du public envers la justice… », a-t-elle prononcé.

La juge Rena Émond décidera donc qui a raison le mercredi 17 août prochain. Le procès sera tiendra ensuite du 19 au 21 septembre.

On se souviendra que Pedro-Antonio Ovalle Leon fait face à 18 chefs d’accusation, dont conduite en état d’ébriété, conduite dangereuse causant la mort et conduite dangereuse causant des lésions corporelles.