Une relève de Tring-Jonction
COMMUNAUTAIRE. Roma Bureau a été cordonnier pendant 39 ans dans son commerce situé à Saint-Victor. Il a passé le flambeau à Nathalie Vachon de Tring-Jonction, à qui il a transmis son savoir-faire et les clés de son commerce.
« On gagne notre vie à faire économiser et c’est bon pour l’environnement » lance M. Bureau. « Les gens font réparer au lieu de jeter. Parfois, ils arrivent avec un manteau, si le zipper est fini, je vais le changer, il y a des manteaux de qualité qui valent la peine d’être réparés, même chose pour les bottes. Mais si je ne peux rien faire ni réparer, je vais le dire au client », indique-t-il.
Pour être cordonnier, il faut être manuel, habile, très débrouillard et avoir l’oeil juste. M.Bureau a d’abord lancé son commerce dans un petit local avant d’acheter la bâtisse actuelle qui était une pizzéria auparavant.
En plus d’avoir été cordonnier, M. Bureau a vendu des bottes de travail, des vêtements de travail, des chaussures de sport, etc. Il fabriquait aussi ses ceintures larges de deux pouces.
Une main-d’oeuvre rare
Le métier de cordonnier se fait très rare de nos jours, mais il a trouvé en Nathalie Vachon, une belle relève pour poursuivre son commerce. Il lui a transmis sa passion.
» Cela fait 10 ans que je cherche une relève. Il y a des gens qui sont venus, mais le travail était trop difficile, trop d’heures, trop ceci, trop cela […] Nathalie était débrouillarde en partant. Elle fait très bien le travail », ajoute M. Bureau.
Mme Vachon pensait depuis longtemps de faire ce métier et un jour, elle a franchi le pas.
« M. Bureau m’a prise tout de suite. J’ai commencé les samedis et un jour, j’ai décidé que cela allait être mon commerce », lance la jeune femme de Tring-Jonction. « Ce n’est pas un travail répétitif. Chaque jour est différent », dit-elle.
M. Bureau ne s’inquiète guère de l’avenir de ce qui a été son commerce, il a seulement peur de s’ennuyer de ses clients qui lui ont été fidèles pendant près de 40 ans.
Cordonnier bien chaussé
Durant sa longue carrière à Saint-Victor, M. Bureau a réparé des bottes, des sièges de motoneige, des sièges de VTT, sièges de tracteur, des selles de cheval, etc. Il a créé un sac d’outils et un sac à clous pour les personnes oeuvrant dans la construction. « J’en ai vendu partout, à Québec, à Montréal, aux États-Unis et en Alberta. Si les gens reviennent à la boutique, c’est qu’ils sont contents. J’ai fabriqué des choses que les autres cordonneries ne font pas. », souligne fièrement le Beauceron de Saint-Victor.
Selon M. Bureau, le matériel a beaucoup changé dans le métier « Les semelles de chaussures, par exemple, ne sont plus ce qu’elles étaient. Il faut connaître les matériaux pour prendre la bonne sorte de colle. Il y a même des semelles qui ne se recollent plus. Beaucoup de matériaux sont faits en Chine et sont de moins bonnes qualités, du synthétique qui ressemble étrangement au cuir », ajoute-t-il.
Selon lui, le métier se fait rare, car les consommateurs d’aujourd’hui achètent du neuf, à moindre prix. Ils préfèrent jeter que faire réparer. Donc, ils achètent plus souvent. « Les consommateurs ne peuvent pas avoir de la qualité avec de bas prix. Toutefois, s’ils sont prêts à acheter du vrai cuir et y mettre le prix, leur achat va leur durer longtemps. Une paire de bottes à 150 $ n’est plus de qualité de nos jours, alors que lorsque j’ai commencé dans le métier, une paire de bottes à 90 $ était considérée de très bonne qualité », remarque-t-il.
Ce cordonnier à la retraite tient à ce qu’on nomme les choses par leur vrai nom. « Du cuir végane, c’est du vinyle. C’est simplement du marketing de vente. Le cuir est trop noble pour qu’on le nomme ainsi. Il faut connaître le cuir pour faire le bon choix. Les vendeurs ne sont pas nécessairement des connaisseurs », indique-t-il.