Un parasite minuscule qui fait de gros ravages

AFFAIRES. L’apiculture (élevage d’abeilles) connaît des hauts et des bas. Toutefois, année après année, les aléas du secteur n’ont jamais représenté plus de 10 % de pertes d’abeilles pour Le miel d’Émilie de-Saint-Sylvestre. Cette année cependant, en raison d’un parasite nommé varroa, on a jusqu’à présent constaté 50 % de pertes.

« On ramasse encore des abeilles mortes », a affirmé Jean-François Doyon, président de l’entreprise, en précisant que les dégâts n’ont pas encore été complètement comptabilisés. Néanmoins, il devine que ses pertes financières atteindront la barre des 2,5 M$. « En 45 ans de métier, c’est la première fois que je vois ça », a-t-il soufflé, en craignant que la situation décourage la relève.

Var… quoi ?

Le varroa est un acarien qui mesure environ un millimètre carré. Il aurait fait son entrée au Canada dans le détour de 1998. « C’est comme un pou qui embarque sur le dos de l’abeille et qui se nourrit de son système lymphatique »,  a-t-il résumé.

Chaque année, des tests de dépistage sont réalisés à plusieurs reprises durant l’été et des traitements normalement appropriés sont utilisés afin de diminuer le taux d’infestation. Cependant, les produits utilisés cette année se sont révélés inefficaces. De plus, il faut savoir que l’entreprise a investi 1,2 M$ il y a 4 ans dans l’aménagement d’un caveau d’hivernement visant à protéger ses quelque 250 millions d’abeilles pendant l’hiver. L’ennui est que le parasite s’y trouvait aussi.

Selon M. Doyon, l’une des causes de la prolifération du varroa pourrait être la prise de conscience collective quant au rôle primordial des abeilles dans l’écosystème. En effet, dans les dernières années, la province a vu se multiplier les apiculteurs amateurs désireux de faire leur part pour l’environnement. Mais, plusieurs d’entre eux connaîtraient mal le métier, ou encore ne réaliseraient à peu près pas de dépistage. Par conséquent, leurs abeilles auraient attrapé des parasites pour ensuite en contaminer d’autres.

Cependant, il y a une foule de facteurs selon lui qui n’aide pas les apiculteurs. Les monocultures n’offrent qu’un très court temps de floraison, le manque de fleurs mellifères (qui produisent un suc que les abeilles récoltent pour faire le miel) durant la saison estivale, les pesticides, ainsi que le stress occasionné par le transport vers des cultures ayant un grand besoin de pollinisateurs. Ceci fait en sorte que les abeilles sont plus faibles que par le passé, donc plus susceptibles d’attraper des virus. Qui plus est, la température est peu clémente actuellement.

Notons que Le miel d’Émilie compte deux autres fermes au Québec, soit dans Portneuf et au Lac-Saint-Jean, mais le varroa s’y est également installé.

Se relever

Afin de pouvoir poursuivre ses activités, l’entreprise recevra sous peu 2000 ruches en provenance de la Colombie-Britannique, tandis que 2000 reines arriveront bientôt de la Californie. Ces ruches et reines s’ajouteront aux abeilles de son cheptel qui auront survécu au varroa. Dans les circonstances, Jean-François -Doyon se considère chanceux dans sa malchance, car les producteurs aux prises avec le varroa sont nombreux et les ruches se font rares. Par ailleurs, des programmes de soutien en agriculture devraient permettre d’aider l’entreprise dans l’immédiat.

Parallèlement, M. Doyon invite les gens à relever le « Défi pissenlit ». Celui-ci consiste tout simplement à ne pas arracher ses pissenlits au printemps. « Ça ne dure pas longtemps, c’est bon pour les abeilles et c’est beau un champ de pissenlits ! », a-t-il lancé. Dans le même ordre d’idées, depuis 25 ans, il demande aux Municipalités d’attendre la fin de l’été avant de tondre ses fossés et bordures de chemins. « Ils sont capables d’attendre fin août, début septembre. Donnez-vous une chance ! »