Les producteurs acéricoles craignent de retourner 20 ans en arrière

Le Rapport Gagné « Pour une industrie acéricole forte et compétitive », présenté en décembre dernier au ministre de l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation, Pierre Paradis, n’avantagerait qu’une poignée de contestataires qui souhaitent contourner le système. Tel est l’avis de représentants des trois syndicats locaux acéricoles, réunis le lundi 22 février au bureau de l’UPA à Sainte-Marie, afin de dénoncer plusieurs recommandations dudit rapport.

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D’abord, Luc Goulet, président du Syndicat des producteurs acéricoles de la Côte-du-Sud, déplore l’idée martelée dans le rapport selon laquelle les acériculteurs québécois auraient perdu des parts de marché. Or, depuis une quinzaine d’années, la production a plus que doublé pour atteindre des records de vente en 2015 (soit 103,3 millions de livres de sirop d’érable). « Bien des secteurs d’activité aimeraient présentement être aussi en santé que le nôtre », a-t-il affirmé.

De son côté, Gérald Morin, président du Syndicat des producteurs acéricoles des Appalaches-Beauce-Lotbinière, est d’avis que la seule épine dans le pied des producteurs actuellement, c’est la Régie des marchés agricoles et alimentaires du Québec. En fait, non seulement le commerce est favorable, mais les acériculteurs d’ici sont prêts depuis deux ans maintenant à augmenter leur production pour ainsi s’adapter au marché, mais la régie ne fait que reporter la demande de 2,5 millions de nouvelles entailles exprimée. « Pendant ce temps-là, nos voisins (les États-Unis) entaillent. On est à la merci de la régie… »

Marcel Larochelle, président du Syndicat des acériculteurs de la Beauce, est pour sa part tracassé par l’élimination possible des contingents. Brièvement, le principe du contingentement est de stabiliser les prix tout en ajustant l’offre de sirop d’érable avec la demande mondiale. « Le rapport demande d’abolir tout ce qu’on a d’outils. Le système en place offre de nombreux avantages, dont celui d’obtenir un prix juste et équitable. Autrefois, plusieurs bonnes années de production finissaient par être peu payantes pour les producteurs, puisque le marché était inondé. Pour un transformateur, c’est rassurant d’avoir une bonne idée du coût de son sirop à l’avance », a-t-il indiqué, en ajoutant que pour emprunter, la première question que pose un financier est: « C’est quoi votre contingent? »

À ce propos, Luc Goulet a soulevé qu’en retirant le système de contingent, plusieurs entreprises ne réussiraient pas à vendre leur sirop. « Ça serait un retour de 20 ans en arrière. On couvrirait à peine nos frais de production », a-t-il commenté, convaincu que ceci ne favoriserait que les producteurs qui tirent leurs revenus de la « vente au noir ».

Enfin, Paul Doyon, président de l’UPA de Chaudière-Appalaches, déplore particulièrement la recommandation 21 du rapport, laquelle propose d’octroyer au ministre ou au gouvernement un droit de veto sur les décisions prises par la régie. « C’est comme si le ministère de la Justice pouvait rendre des décisions judiciaires qui font son affaire à la place des juges! Est-ce vraiment ce qu’on souhaite comme système au Québec? », s’interroge-t-il.

Au cours des prochains jours, les acériculteurs de la région iront rencontrer leurs députés provinciaux pour leur faire part de leurs inquiétudes. « Nous voulons demander l’appui de nos élus afin de montrer au gouvernement provincial que l’acériculture fait partie du développement économique de nos régions. On va mettre un peu plus de pression », a conclu M. Goulet.

On se souviendra que le 16 février dernier, de nombreux producteurs de sirop d’érable avaient manifesté leur indignation concernant les recommandations du Rapport Gagné devant l’Assemblée nationale à Québec.

 

Le Rapport Gagné est disponible au www.mapaq.gouv.qc.ca/fr/Publications/RapportErableFINAL.pdf