Alex Jones devra payer 965 millions de dollars aux proches des victimes de Sandy Hook

WATERBURY, Conn. — Le complotiste Alex Jones devra payer 965 millions de dollars aux personnes qui ont souffert de ses fausses affirmations selon lesquelles la fusillade de l’école primaire de Sandy Hook était un complot, a décidé mercredi un jury du Connecticut.

Le verdict est le deuxième jugement majeur contre l’animateur de l’émission Infowars. Selon les accusations portées contre lui, M. Jones aurait fait la promotion incessante du mensonge selon lequel le massacre de 2012 à Sandy Hook n’aurait jamais eu lieu, et que les familles en deuil étaient des acteurs embauchés dans le cadre d’un complot visant à contrôler les armes à feu dans le pays.

La décision s’inscrit dans le cadre d’une poursuite intentée par les proches de cinq enfants et de trois éducateurs tués dans la fusillade, ainsi qu’un agent du FBI ayant été parmi les premiers répondants sur les lieux. 

En août, un jury du Texas avait accordé près de 50 millions de dollars aux parents d’un autre enfant décédé lors de l’événement.

Robbie Parker, qui a perdu sa fille de 6 ans, Emilie, a déclaré avec émotion devant le tribunal du Connecticut qu’il était fier d’avoir accompli ce processus dans le simple but de dire la vérité, et que cela n’aurait pas dû être aussi difficile.

Alex Jones n’était pas présent lors du procès, mais a réagi par le biais de son émission Infowars.

«Hé, les amis, n’allez pas vous acheter de grosses maisons», a-t-il dit.

Lors du procès, les familles de victimes ont livré des témoignages chargés d’émotions, racontant comment ils avaient été menacés et harcelés pendant des années par des personnes qui croyaient aux mensonges véhiculés par l’émission de M. Jones. Ils ont expliqué que des inconnus s’étaient présentés chez eux pour les filmer, et des gens avaient publié des commentaires hostiles à leur égard sur les réseaux sociaux. 

Erica Lafferty, la fille de Dawn Hochsprung, directrice de Sandy Hook, a témoigné que des gens avaient envoyé des menaces de viol chez elle par la poste. Mark Barden a détaillé comment des complotistes avaient uriné sur la tombe de son fils de 7 ans, Daniel, et menacé de déterrer son cercueil.

Lors du procès, Alex Jones a reconnu devant le tribunal qu’il avait eu tort à propos de Sandy Hook, affirmant que la fusillade était réelle. Il s’est toutefois montré provocateur, à la fois en cour et dans son émission, qualifiant les procédures judiciaires de «tribunal bidon».

Le complotiste s’est moqué du juge, a qualifié l’avocat des plaignants de «chasseur d’ambulance» et a déclaré que l’affaire était un affront au droit à la liberté d’expression. Il a également affirmé qu’il s’agissait d’un complot des démocrates et des médias pour le faire taire et le pousser vers la faillite.

«J’ai déjà dit que j’étais désolé des centaines de fois, et j’ai fini de le dire», a-t-il déclaré lors de son témoignage.

Vingt enfants et six adultes sont morts dans la fusillade du 14 décembre 2012. Le procès en diffamation s’est déroulé dans un palais de justice de Waterbury, à environ 32 kilomètres de Newtown, où l’attaque avait pris place.

La poursuite avait accusé Alex Jones et la société mère de son émission Infowars, Free Speech Systems, d’avoir utilisé le massacre pour accroître son auditoire et empocher des millions de dollars.

Des experts ont témoigné que l’auditoire de M. Jones avait augmenté lorsque l’animateur avait commencé à parler de Sandy Hook dans son émission, tout comme ses revenus issus de la vente de produits.

Dans les deux poursuites, tenues au Texas et au Connecticut, les juges ont déclaré l’entreprise responsable des dommages après que M. Jones n’ait pas coopéré avec le tribunal par rapport au partage des preuves. Le complotiste avait, entre autres, refusé de remettre des dossiers qui auraient pu révéler qu’Infowars avait bénéficié de sa désinformation volontaire sur les tueries de masse.

Parce qu’il avait déjà été reconnu responsable, Alex Jones s’est vu interdire de mentionner, entre autres, les droits à la liberté d’expression lors de son témoignage.

M. Jones fait maintenant face à un troisième procès, qui se déroulera au Texas vers la fin de l’année, dans le cadre d’une poursuite intentée par les parents d’un autre enfant tué dans la fusillade.

On ignore le nombre de décisions que M. Jones sera en mesure de payer. Lors du procès au Texas, il a témoigné qu’il ne pouvait pas se permettre de payer une somme supérieure à 2 millions de dollars.

Free Speech Systems a d’ailleurs déposé une demande de protection contre la faillite, mais un économiste a témoigné lors de la procédure au Texas qu’Alex Jones et sa société valaient jusqu’à 270 millions de dollars.