Siropter

TERROIR. Le goût du sirop d’érable change-t-il d’une région du Québec à une autre?

Cette question a toujours été «dans l’air du temps», comme l’explique Nathalie Martin chercheuse au Centre ACER. L’idée qu’il serait possible de déceler des différences dans le sirop provenant de la Beauce, de l’Estrie ou même du Centre-du-Québec a toujours fait l’objet de questionnements. Est-ce que chaque territoire rend le sirop unique?

La réponse à cette question n’est pas définitive comme vous le verrez dans ce reportage se déclinant en trois volets.

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Si on cherche un endroit où se référer sur le goût du sirop d’érable, c’est bien au Centre ACER de Saint-Norbert-d’Arthabaska qu’il faut se diriger.

Son équipe de chercheurs et leur bataillon de goûteurs travaillent d’arrache-pied à investiguer la ressource depuis sa fondation en 1998. Ils en connaissent beaucoup sur les mauvais sirops. Le Centre s’assure notamment de la qualité et de la couleur des barils de la Fédération des producteurs acéricoles du Québec (FPAQ).

Détecter et caractériser le mauvais sirop sont devenues leurs spécialités au fil du temps. Ils ont même développé une langue électronique afin de rendre leur travail plus rapide. Connaître les éléments qui l’influencent les saveurs du sirop est une autre paire de manches.

«Il est certain qu’en ce moment l’industrie mise plus sur la couleur que les différentes nuances de saveurs, mais tranquillement les gens s’y intéressent de plus en plus», estime Nathalie Martin, chercheure au Centre ACER.

La dernière étude approfondie sur le goût du sirop d’érable remonte à 2004, le Centre a développé à cette époque un outil de caractérisation du goût. La roue des flaveurs comprend une variété de nuances. Elle schématise les types de saveurs qu’on peut desceller dans le sirop par des références à des saveurs connues. «Il existe des roues de ce genre pour les vins et d’autres aliments. C’est un vocabulaire développé pour la dégustation du produit», explique Nathalie Martin.

Cette roue des flaveurs est toujours utilisée aujourd’hui. Elle sert notamment d’outil de formation et de vulgarisation. Depuis 2004, il n’y a pas eu d’études approfondies sur les procédés qui provoquent les nuances dans le goût. Les chercheurs ont investigué l’influence du moment dans la saison sur le goût et la couleur. «On passe généralement d’un goût plus délicat à un goût plus robuste au sein d’une même saison. C’est dû à la composition de la sève, décrit Nathalie Martin.

Le Centre a aussi accumulé des données sur la technologie d’injection d’air, mais le mystère plane toujours sur des pans entiers du goût de l’érable.

Nathalie Martin espère un jour pouvoir guider les producteurs adéquatement dans leurs moyens de production. Connaître les conditions gagnantes pour en arriver au goût recherché, «c’est dans cette direction qu’on aimerait se diriger.»

Plusieurs facteurs peuvent influencer le goût du sirop comme le raconte Martin Pelletier, chef d’équipe en transfert de technologie au Centre ACER: «la température de la sève, lorsqu’elle est ajoutée aux pannes, le temps qu’elle a passé dans le réservoir et toute la mécanique autour de l’évaporateur peut avoir un impact sur le goût du sirop.»

C’est la raison pour laquelle il serait presque improbable de pouvoir différencier le sirop selon l’endroit où il a été produit. La cuisson est le principal élément générateur des saveurs. Elle noie les influences secondaires qui pourraient provenir des caractéristiques du sol ou de l’environnement.

Le savoir-faire de l’acériculteur, sa technique apprise et répétée année après année, donne naissance au goût de son sirop plus que l’endroit où se trouve son érablière.