La confidente de Frampton

RETRAITE. Doris Giguère est plus qu’une maître de poste. Des dizaines de personnes se sont confiées à elle au cours de ses 30 ans derrière le comptoir de Frampton. 

Dans un petit local adjoint à une résidence de la rue Principale, Doris Giguère n’en finit plus de recevoir les attentions de ses clients. Une montagne de cartes et de cadeaux trône derrière le comptoir des postes.
Ses derniers jours de travail ne passent pas inaperçus. Les gens entrent la saluer pour une dernière fois. On lui offre une bouteille de champagne, des cartes d’amitiés et toutes sortes d’attention. «J’ai toujours été une bonne confidente. Je garde toujours les secrets que les gens me disent. Je pense que c’est pour ça que les gens reviennent souvent au bureau de poste», conte-t-elle entre deux coups de téléphone.
«Hier, j’ai tellement reçu d’appels que je suis revenue chez moi avec un mal de tête», raconte la maître des postes de Frampton.

Doris Giguère semble avoir été plus qu’une employée de Postes Canada. «J’ai même invité certains de mes clients à mon mariage», dit-elle en riant.

Bien qu’on communique aujourd’hui davantage électroniquement, Doris Giguère est convaincue que le bureau de poste a toujours sa place dans les petites communautés. «Avant la caisse Desjardins jouait se rôle de rassemblement, mais bientôt il n’y aura plus qu’un guichet automatique», prend-elle à titre d’exemple.

Les colis sauvent la poste. Nombre de Framptonnien ont l’habitude de faire des achats par internet. «Il y a même un client qui a commandé des pneus de la Roumanie parce qu’ils étaient moins chers là-bas», répond Doris Giguère. Elle est confiante que la poste est un service qui est là pour rester.

Il n’y a eu que deux maîtres de poste dans la municipalité des contreforts des Appalaches. Au tournant de la Seconde Guerre mondiale, le gouvernement canadien a remercié certains de ses vétérans en leur donnant un bureau de poste au retour de leur service. Un certain M. Soucy s’est occupé des postes de Frampton avant l’arrivée de Doris Giguère en 1987.

À l’affût des fraudeurs

Doris Giguère a un sens aigu de l’observation. Elle l’a démontré à deux occasions. Un individu s’est un jour présenté au bureau et a commandé 20 rouleaux de timbres. «Je n’avais jamais vu ça. Il m’a raconté que son père avait une entreprise de soie à Thetford Mines.» Elle a alerté ses collègues de travail dans les autres bureaux. L’une d’elles a pris en note la plaque d’immatriculation et les fraudeurs ont finalement été arrêtés. Ce n’est que trois mois plus tard qu’ils se sont rendus compte que la carte de crédit avait été volée.

Les gens en détresse sous son aile

Une personne s’est un jour présentée au bureau de poste avec l’intention de verser un important montant d’argent en Afrique. «Elle était jeune et j’ai vu qu’il y avait quelque chose qui ne clochait pas.», raconte-t-elle.

Doris Giguère a compris au fil de la discussion que cette personne a envoyé plusieurs milliers de dollars à des fraudeurs sur internet qui la menaçaient de publier des images à caractère sexuel au grand public. «C’était l’hiver et il faisait froid. J’ai moi-même été la reconduire à la station de Police afin qu’on l’aide. Je ne la juge pas. Elle était désespérée», raconte-t-elle avec une certaine fierté.

Retraite occupée

Doris Giguère s’occupera à sa retraite du jardin communautaire et des boîtes à livre de Saint-Joseph-de-Beauce, où elle habite. Elle continuera comme elle l’a toujours fait de renforcir le tissu de la communauté, un sourire et une pelletée de terre à la fois.