Le marché des véhicules d’occasion est frappé par un choc électrique

MONTRÉAL — Devant la difficulté de se procurer un véhicule électrique neuf dans un temps raisonnable, un nombre impressionnant de consommateurs se tournent vers les modèles d’occasion, mais avec la flambée des prix des véhicules usagés, il vaut mieux faire preuve de prudence avant de conclure une transaction.

C’est un peu le monde à l’envers dans le marché de l’automobile usagé. Habituellement, un véhicule déprécie dès sa sortie du concessionnaire, mais aujourd’hui, les véhicules d’occasions ont parfois des allures d’investissement, particulièrement certains modèles de voitures électriques.

Par exemple, en décembre dernier, le prix moyen d’une Tesla Model S d’occasion a augmenté de 41 % par rapport à décembre 2020 selon les données émanant d’une analyse réalisée par la plateforme de vente de véhicules AutoHebdo.

«L’augmentation de la valeur des véhicules usagés, c’est du jamais vu, lance Benoît Béland, directeur principal marketing d’AutoHebdo. Les concessionnaires s’arrachent nos véhicules usagés», et c’est particulièrement le cas pour les véhicules électriques (VÉ), précise-t-il.

Au Québec, les recherches pour les VÉ sur le site d’AutoHebdo ont augmenté de 85% en mars 2022 par rapport à la même période l’année dernière et le nombre de consommateurs qui songent à se brancher et qui demandent de l’information aux concessionnaires via la plateforme d’AutoHebdo a augmenté de 1218% en un an !

Dans un contexte où les prix flambent et où l’offre ne répond plus à la demande, il faut particulièrement être prudent et bien analyser les prix, suggère le directeur principal marketing d’AutoHebdo.

«Sur notre plateforme, on a un algorithme qui va comparer tous les prix des modèles similaires en temps réel, donc si on raffine notre recherche, c’est super facile de voir si le prix qui est demandé est au-dessus de la moyenne ou en dessous de la moyenne», indique Benoît Béland qui ajoute que même dans ce contexte inédit, il y a de bonnes occasions pour le consommateur qui se donne la peine d’utiliser les bons outils et de bien chercher.

Rentabilité

L’expert automobile de CAA-Québec Jesse Caron a présenté une conférence sur les mythes et les réalités des VÉ et une autre sur l’achat d’un véhicule électrique d’occasion au Salon du véhicule électrique de Montréal, ce week-end.

Selon lui, acheter un véhicule électrique, neuf ou d’occasion, est généralement plus rentable qu’acheter son équivalent à essence.

«C’est vrai que la différence de prix peut être assez marquée lors de l’achat, ça peut-être un frein, mais le moindrement qu’on roule avec un véhicule électrique, on commence à le rentabiliser après quelques années».

Jesse Caron appuie ses dires par des données très récentes analysées par son équipe en prévision du Salon du véhicule électrique de Montréal concernant les véhicules d’occasion.

Ces estimations indiquent par exemple qu’un Kia Soul électrique 2016 coûte près de 6000$ de plus que sa version à essence sur le marché de l’occasion, mais il permet d’éviter de dépenser en moyenne 2 750$ en carburant par année. La version électrifiée devient donc une «meilleure affaire» après un peu plus de deux ans.

Toujours selon l’analyse de la CAA, il faut débourser environ 3 600$ de plus pour un Mitsubishi Outlander hybride rechargeable 2018 que pour son équivalent à essence. Toutefois, la version hybride rechargeable permet en moyenne d’économiser 1 700$ en carburant par année, elle devient donc «plus rentable» après deux ans.

Les hybrides classiques sont également plus avantageux, dans une moindre mesure, pour les consommateurs qui souhaitent conserver leur véhicule plusieurs années. Par exemple, un Toyota RAV 4 Hybride 2017 a une valeur marchande d’environ 5000$ de plus que son équivalent qui fonctionne uniquement à l’essence, mais il permet d’économiser en moyenne 770$ en carburant par année. La version hybride de ce véhicule d’occasion devient donc plus intéressante économiquement après environ 6 ans.

Faire analyser la batterie

Jesse Caron conseille fortement au consommateur de faire analyser la batterie du véhicule usagé qu’il compte acheter avant de conclure une transaction.

«À mesure qu’elles vieillissent, il y a une perte d’autonomie qui est naturelle, les batteries se dégradent avec le temps», indique l’expert automobile de CAA en précisant que c’est particulièrement le cas pour les premiers véhicules électriques arrivés sur le marché il y a une dizaine d’années.

Il est possible de vérifier l‘état d’une batterie en regardant sur l’écran de certains véhicules électriques, mais cette méthode a des limites.

«Se fier aux barres sur l’écran peut être une option, mais c’est mieux de trouver un atelier qui va faire un examen avec des appareils qui vont mesurer précisément le pourcentage de dégradation de la batterie» souligne Jesse Caron en ajoutant que simplement se fier à l’information sur l’écran du véhicule «c’est comme faire un examen visuel d’un véhicule sans le faire inspecter par un mécanicien ».

Si on doit changer la batterie d’un véhicule électrique, «ce qui est très rare» selon Jesse Caron, la CAA recommande de traiter avec le fabricant d’origine et d’éviter de faire appel à un fournisseur tiers.

Selon AutoHebdo, les deux tiers des consommateurs québécois considèrent que leur prochain véhicule sera un véhicule électrique. Afin de déterminer si c’est la formule hybride, hybride rechargeable ou entièrement électrique qui convient, il vaut mieux bien s’interroger sur les besoins réels en autonomie et le type de déplacements qu’on compte effectuer. Il faut également prendre le temps d’analyser les subventions qu’offrent les différents gouvernements. Au Québec, seuls certains modèles et années de véhicules d’occasion peuvent être éligibles au rabais. Les subventions peuvent également différer selon la valeur du véhicule et la capacité de sa batterie.