L’arbre qui cache la forêt

COMMENTAIRE. Lorsqu’on est parent, on travaille comme des chevaux pour essayer de maintenir une routine efficace. Afin de pouvoir continuer de courir à bride abattue, tout ce que l’on souhaite, c’est que nos enfants arrivent à « rentrer dans le moule ». Le problème, c’est que le moule n’existe pas.

C’est en effet étrange comment nous pouvons concentrer toute notre attention sur une mèche de cheveux qui semble vouloir se dissocier du reste de la population capillaire crânienne de nos enfants. Pourtant, on se contre-saint-ciboirise de la coupe « bataille d’oreillers » de ses camarades de classe. Nous portons des œillères imaginaires qui masquent de la société les travers qu’on ne saurait voir, mais si on prenait vraiment le temps de regarder les tignasses nucléairo-hasardeuses de ses amis, on se dirait: « Bah! Il est bien correct finalement. »

De temps à autre, ce sont leurs caprices qui sont énervants: « Combien de bouchées? Est-ce que je suis obligé? Encore 5 minutes de télé, s’il-te-plaîîîîîîît…. » Pourquoi il s’entête à demander? Ça fait huit ans qu’il se fait dire non (ou 2922 dodos), et il joue encore les surpris… Pendant que vous rêvez à la claque en arrière de la tête que vous aimeriez lui administrer, je vous invite à porter une oreille attentive la prochaine fois que vous vous promènerez à l’orée d’un magasin de jouets. Devant les demandes déraisonnables et incessantes de votre enfant, vous vous direz: « Bah! Il est bien correct finalement. »

Sinon, votre petit bonhomme se prend pour un Yvon Deschamps de bac à sable, mais toutes ses blagues abordent le thème indélicat des matières fécales? Restez zen. Si vous pouviez surveiller une récréation du début à la fin, vous verriez qu’entre les flatulences de dessous-de-bras de l’un et les dégustations de fermentations nasales de l’autre, les plaisanteries scatophiles de votre garnement préféré demeurent les plus hygiéniques.

À d’autres moments, peut-être avez-vous l’impression que votre marmot se traîne les pieds dans ses cours (de karaté, guitare, hockey, piano, gymnastique…)? C’est frustrant, je le sais. MAUDIT que je le sais. Toutefois, sachez qu’il peut être diablement réconfortant d’observer la nonchalance de ses coéquipiers.

Anecdote. À son spectacle de musique l’an dernier, aussi impliqué était-il, j’ai trouvé que mon garçon semblait parfois visiter notre satellite naturel avec son esprit. En montrant la vidéo à ma belle-maman, celle-ci m’a asséné une merveilleuse gifle psychologique simplement en m’invitant à regarder les autres artistes en herbe: l’un se grattait le dos avec la baguette de son xylophone, l’autre manquait une note sur deux, un troisième se tortillait comme une mère qui aurait entendu la phrase: « Ça aurait l’air qu’il y a des poux à l’école ces temps-ci. »… Ils étaient tous adorables, je tiens à le souligner, mais j’ai dû m’avouer une chose: « Bah! Il est bien correct finalement. »