Loi sur la laïcité: les candidats à la chefferie conservatrice se positionnent

OTTAWA — La candidate à la chefferie conservatrice et députée recrue Leslyn Lewis a déclaré lundi que la loi québécoise sur la laïcité de l’État constituait de la «discrimination religieuse explicite».

Mme Lewis, qui se présente pour la deuxième fois dans la course à la direction, affirme que le Parti conservateur du Canada doit prendre des décisions «basées sur des principes» et non sur la façon dont il sera perçu par un segment démographique particulier. 

La loi, adoptée en juin 2019 à l’Assemblée nationale, interdit aux employés de l’État en position d’autorité coercitive, comme les juges, les policiers et les gardiens de prison, de même qu’aux enseignants, de porter des signes religieux dans l’exercice de leurs fonctions.

La déclaration de Mme Lewis sur la loi québécoise controversée intervient alors que d’autres candidats ont pris position sur cette question. Certains députés conservateurs avaient appelé le parti à adopter une position plus ferme. Ils avaient critiqué l’ancien chef Erin O’Toole pour avoir déclaré que même s’il s’opposait personnellement à cette loi, il valait mieux laisser aux Québécois le soin de décider.

Mme Lewis a promis que si elle était élue à la tête du parti, elle condamnerait la discrimination religieuse, peu importe la cible ou l’endroit. 

Un autre candidat dans la course, son collègue aux Communes Pierre Poilievre, vétéran député de la région d’Ottawa, soutient lui aussi qu’il s’oppose à la loi sur la laïcité. 

«Si quelqu’un le proposait au niveau fédéral, mon gouvernement ne le laisserait pas passer, a-t-il indiqué dans un communiqué. Je respecte le droit du Québec de faire ses propres lois, mais j’espère que la province abrogera (cette loi).» 

L’ancien premier ministre du Québec Jean Charest, lui aussi candidat à la chefferie, a également déclaré qu’il s’opposait à la loi sur la laïcité.

Le maire de Brampton, Patrick Brown, qui s’est officiellement lancé dans la course dimanche, a tenu à rappeler lundi qu’il s’était fermement opposé à la loi québécoise — et il croit que le Parti conservateur peut gagner en le faisant.

Brown attaque Poilievre sur le niqab

M. Brown, le plus récent candidat dans la course, a par ailleurs fustigé Pierre Poilievre, lundi, pour sa présence au sein du parti en 2015 lorsque Stephen Harper a proposé de créer une ligne de dénonciation pour les «pratiques culturelles barbares».

L’attaque est venue alors que M. Poilievre a passé les derniers jours à rencontrer des dirigeants de communautés culturelles du Grand Toronto. Il a aussi promis de militer pour une réduction de la bureaucratie pour les immigrants qui souhaitent obtenir les permis et licences nécessaires afin de travailler dans des secteurs réglementés de main-d’oeuvre.

M. Brown a publié lundi matin un communiqué dans lequel il soutient que le vétéran député de la région d’Ottawa manque de crédibilité sur toute politique qui a un impact sur les communautés minoritaires, compte tenu de son rôle dans la campagne électorale conservatrice en 2015.

C’est au cours de cette campagne électorale que le parti du premier ministre Stephen Harper avait promis de créer une ligne téléphonique pour que les Canadiens puissent dénoncer les soi-disant «pratiques culturelles barbares». Les conservateurs soutenaient alors qu’il s’agissait de dénoncer des choses comme le mariage forcé.

M. Poilievre se présentait à l’époque pour être réélu aux Communes, où il siège depuis 2004. Il faisait aussi partie du gouvernement Harper lorsqu’il a présenté un projet de loi qui aurait obligé les candidats à la citoyenneté canadienne à prêter serment à visage découvert lors des cérémonies de citoyenneté. Ce projet de loi a été invalidé par les tribunaux.

M. Brown a soutenu lundi que M. Poilievre n’avait jamais dénoncé à l’époque ces deux mesures. Le camp Brown précise aussi que Jenni Byrne, qui était la directrice de campagne nationale du parti en 2015, oeuvre maintenant dans l’équipe Poilievre.

M. Poilievre a répondu lundi en traitant M. Brown de «menteur», l’accusant d’avoir mal interprété ce que voulait faire M. Harper à l’époque. «Il n’y avait pas d’interdiction du niqab», a-t-il soutenu dans un communiqué publié sur les réseaux sociaux.

«Je n’appuierais jamais cela, et M. Harper non plus. Ce que M. Harper a proposé, c’est que le visage d’une personne soit visible lors de la prestation de serment pendant les cérémonies de citoyenneté.»

M. Poilievre n’évoque pas la proposition d’une ligne de dénonciation des «pratiques culturelles barbares». Il ajoute qu’il continuerait à soutenir l’immigration et l’égalité.

Le député d’Edmonton Tim Uppal, qui a été nommé coprésident de la campagne de M. Poilievre, s’est déjà excusé pour le rôle qu’il avait joué à l’époque dans la promotion de l’interdiction du niqab. Il soutient aujourd’hui que le Parti conservateur est toujours aux prises avec les retombées négatives de ces promesses électorales pour les communautés racialisées du pays.

Un examen de la défaite électorale des conservateurs en 2021, soumis en janvier, est arrivé à une conclusion similaire, selon trois sources qui ont parlé à La Presse Canadienne sous couvert d’anonymat.