Loi spéciale en Ontario: des syndicats du Québec prêts à manifester à Toronto

MONTRÉAL — La loi spéciale du gouvernement Ford pour empêcher la grève d’employés de soutien dans le milieu scolaire a des échos jusqu’au Québec, où le front commun intersyndical s’affaire à voir de quelle façon il peut appuyer ces travailleurs ontariens.

«S’il faut aller à Toronto, on va aller à Toronto», a lancé le président de la FTQ, Daniel Boyer, vendredi en entrevue.

Le syndicat principalement touché en Ontario est le Syndicat canadien de la fonction publique (SCFP), qui a un syndicat frère du même nom au Québec, qui compte 135 000 membres et est affilié à la FTQ.

Et tant la FTQ que la CSN représentent des employés de soutien, des emplois touchés en Ontario par cette loi spéciale.

«C’est le mouvement syndical canadien tout entier qui va se mobiliser», a prévenu M. Boyer.

À ses côtés, le premier vice-président de la CSN, François Énault, a souligné l’ironie de la situation, alors que les gouvernements québécois et ontarien éprouvent des difficultés à recruter ce genre de travailleurs, souvent «à statut précaire et sous-payés».

«On cherche à attirer du monde, à retenir du monde. Et là, on va les écoeurer avec des lois spéciales de ce genre-là. Moi je pense qu’on n’est pas dans le bon chemin là», a critiqué Daniel Boyer.

«Il est clair que ça vient nous toucher. C’est pas une question d’allégeance syndicale, c’est une question de lutte syndicale», a souligné M. Énault.

La loi spéciale du gouvernement Ford soulève l’ire, dans le milieu syndical, d’autant plus que la Cour suprême du Canada avait rendu en 2015 l’arrêt Saskatchewan, qui avait accordé une protection constitutionnelle au droit de grève.

La Cour suprême du Canada avait statué que le droit de grève servait à équilibrer le rapport de forces entre les parties et qu’il devait, en ce sens, bénéficier de la protection de la charte. Mais le gouvernement Ford a eu recours à la clause dérogatoire, ou «nonobstant», pour soustraire sa loi à cette protection.

Trudeau aussi

Le premier ministre du Canada, Justin Trudeau, a réitéré son malaise de voir le droit de grève ainsi bafoué, alors qu’il participait à un point de presse dans la grande région de Toronto.

«Ce n’est pas une petite chose de suspendre les droits fondamentaux des Canadiens, particulièrement dans ce cas-ci de suspendre le droit de négocier des conventions collectives, le droit des travailleurs de demander de meilleures conditions de travail. C’est un des fondements de notre démocratie», a commenté le premier ministre Trudeau.

Interrogé à savoir si le gouvernement fédéral pouvait intervenir, il a répondu que «le gouvernement fédéral a certainement un rôle qu’on peut jouer pour regarder nos options, pour essayer d’intervenir avec ces provinces qui continuent de bafouer les droits fondamentaux des Canadiens, des citoyens».

Mais il a aussi invité les Canadiens eux-mêmes à faire connaître leur mécontentement, «à rouspéter» auprès de leur gouvernement qui agit ainsi.