Les familles de femmes autochtones disparues à Winnipeg déçues d’une rencontre
OTTAWA — Les familles de deux femmes des Premières Nations dont les restes se trouveraient dans une décharge de Winnipeg se disent déçues par une rencontre avec un ministre libéral à Ottawa.
On soupçonne que les restes de Morgan Harris et Marcedes Myran se trouvent dans la décharge de Prairie Green, une installation privée au nord de Winnipeg, et les familles ont demandé aux dirigeants provinciaux et fédéraux de financer les recherches.
Leurs familles s’attendaient à ce que le ministre des Relations Couronne-Autochtones, Gary Anandasangaree, leur dise que le gouvernement fédéral financerait les recherches lors de leur rencontre de lundi.
Un communiqué diffusé par le cabinet du ministre mentionne que la situation est «déchirante et fait partie de la triste réalité des femmes et des filles autochtones disparues et assassinées», mais n’a pas annoncé le début d’une opération de recherche.
«Nous continuons de discuter avec l’Assemblée des chefs du Manitoba et la Première Nation de Long Plain sur les prochaines étapes. Nous sommes déterminés à poursuivre ce dialogue et à poursuivre les travaux qui aborderaient les complexités et les conclusions de l’étude de faisabilité».
L’étude de faisabilité financée par le gouvernement fédéral a révélé qu’une fouille de la décharge est possible, mais que les matières toxiques et l’amiante pourraient présenter un risque pour les travailleurs.
Un comité dirigé par des Autochtones a consulté des experts sur les meilleures pratiques en matière d’exploitation minière d’une décharge, y compris un expert ayant participé à la recherche des restes humains dans la ferme porcine du tueur en série Robert Pickton en Colombie-Britannique.
Les recherches pourraient prendre jusqu’à trois ans et coûter 184 millions de dollars sans aucune garantie de succès. Mais le rapport indique que renoncer aux fouilles pourrait être encore plus préjudiciable pour les familles des femmes.
Déception et colère
La fille de Morgan Harris, Cambria Harris, a qualifié la réunion d’expérience traumatisante et affirme que le gouvernement fédéral n’a pas encore promis d’aider.
«Il était clair aujourd’hui — le précédent a été créé — que la réconciliation était morte», a-t-elle déclaré.
Jeremy Skibicki a été accusé de meurtre au premier degré pour la mort de Mmes Harris et Myran et de deux autres personnes: Rebecca Contois, dont les restes partiels ont été retrouvés dans une autre décharge l’année dernière, et une femme non identifiée que les dirigeants autochtones appellent Mashkode Bizhiki’ikwe ou «Buffalo Woman».
Les familles, leurs sympathisants et des organisations, dont Amnistie internationale Canada, soulignaient lundi la Journée internationale d’action pour les recherches dans les dépotoirs, dans le but de faire pression sur les gouvernements pour qu’ils en fassent davantage.
Mme Harris a déclaré qu’il était « ignoble » que M. Anandasangaree appelle à une réunion avec les familles et leurs partisans pendant une journée consacrée à l’action.
«Je ne pense pas que ce gouvernement se rende compte que s’il ne fouille pas cette décharge, nous avons tout un tas de membres de la communauté qui y entreront avec des excavatrices, et nous irons récupérer nos proches nous-mêmes», a-t-elle déclaré.
En ne s’engageant pas à effectuer une fouille dans la décharge, Mme Harris a déclaré que le ministre avait envoyé le message que le Canada se contentait de « laisser les femmes et les filles autochtones dans les déchets ».
Geraldine Shingoose, une aînée et survivante des pensionnats pour enfants autochtones qui était présente lors de la réunion, a refusé le tabac que M. Anandasangaree lui avait offert. Offrir un cadeau cérémonial de tabac aux peuples autochtones est un signe de respect. Le fait que l’offre ait été refusée montre à quel point les participants n’ont pas apprécié le déroulement de la réunion.
La cheffe de la Première Nation de Long Plain, Kyra Wilson, qui était également présente, a déclaré que le gouvernement fédéral a la responsabilité de travailler avec les Premières Nations. Si le gouvernement fédéral n’est pas disposé à travailler avec elles, ils envisageront une action en justice, a ajouté Mme Wilson.
Jordan Myran, la sœur de Marcedes Myran, a pris la parole lors d’un rassemblement devant le bureau de M. Anandasangaree. Elle a déclaré qu’elle ne devrait pas avoir à supplier continuellement les politiciens de se soucier suffisamment de sa sœur pour financer une recherche.
«C’est dégoûtant que cela fasse 10 mois, a-t-elle déploré. Ma sœur était humaine. Ma sœur mérite un enterrement digne de ce nom.»
Lundi, au Manitoba, la première ministre Heather Stefanson a déclaré qu’elle maintenait sa décision précédente de ne pas fouiller la décharge.
«C’est une décision très difficile qui devait être prise, a réitéré Mme Stefanson lors d’une conférence de presse. Nous ne voulons mettre aucune vie en danger lors de la recherche de la décharge.»
Des dizaines de personnes se sont rassemblées devant l’Assemblée législative du Manitoba, vêtues de jupes rouges et de rubans, brandissant des pancartes appelant les politiciens à donner leur feu vert à une fouille de la décharge.