Après les chars, l’Ukraine demande des avions

KYIV, Ukraine — L’Ukraine fait pression sur ses alliés occidentaux pour qu’ils lui fournissent des avions de chasse, une semaine après avoir obtenu des promesses de chars modernes et sophistiqués pour l’aider à repousser les forces d’invasion russes après presque un an de combats.

Le ministre ukrainien de la Défense, Oleksii Reznikov, était attendu mardi à Paris, où des discussions sur la livraison éventuelle d’avions de chasse à l’Ukraine étaient prévues à l’ordre du jour.

Après des mois de marchandage, les autorités ukrainiennes ont persuadé la semaine dernière les alliés occidentaux, dont le Canada, d’envoyer les chars. Cette décision a été prise malgré l’hésitation et la prudence de certains membres de l’OTAN, dont les États-Unis et l’Allemagne.

Rien n’indique qu’une décision sur l’envoi d’avions de guerre en Ukraine puisse être prise prochainement, ni que les pays occidentaux aient modifié leur position antérieure sur la question. Certains dirigeants occidentaux ont exprimé leur inquiétude quant à l’escalade du conflit qui dure depuis près d’un an et à la possibilité de s’engager plus avant dans la guerre.

Les responsables de Kyiv ont à plusieurs reprises exhorté les alliés à envoyer des avions à réaction, affirmant qu’ils sont essentiels pour contester la supériorité aérienne de la Russie et assurer le succès des futures contre-offensives qui pourraient être menées par des chars récemment promis par les pays occidentaux.

Lorsqu’un journaliste lui a demandé lundi si son administration envisageait d’envoyer des avions de combat F-16 à l’Ukraine, le président américain Joe Biden a répondu «non».

Les alliés de l’Ukraine ont également exclu de fournir à Kyiv des missiles à longue portée capables de frapper le territoire russe, signalant une position tout aussi prudente sur les avions de guerre.

Interrogé mardi sur les livraisons d’armes occidentales à l’Ukraine, le ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov, a répété que, selon le Kremlin, «l’OTAN est depuis longtemps directement impliquée dans une guerre hybride contre la Russie».

Il a ajouté, à l’issue de ses entretiens à Moscou avec le ministre égyptien des Affaires étrangères Sameh Shoukry, que l’armée russe «prendra toutes les mesures nécessaires pour faire échouer la réalisation des plans occidentaux».

Il a indiqué que M. Shoukry avait transmis un message du secrétaire d’État américain Antony Blinken au sujet de l’Ukraine, qui répétait les précédents appels de Washington à un retrait de la Russie.

M. Lavrov a déclaré que «la Russie est prête à entendre toute proposition sérieuse ― je tiens à souligner ce mot ― visant à un règlement global de la situation actuelle».

On pense que l’Ukraine et la Russie renforcent toutes deux leurs arsenaux en vue d’une offensive attendue dans les mois à venir. La guerre a été largement bloquée sur le champ de bataille pendant l’hiver.

Comme lors des précédents débats sur la manière d’aider l’Ukraine, la Pologne est l’un des principaux défenseurs de l’aide militaire au sein de l’Union européenne. La Pologne, la Slovaquie et les pays baltes situés sur le flanc oriental de l’OTAN se sentent particulièrement menacés par la Russie.

Interrogé sur l’appel de la Lituanie à fournir des avions de chasse et des missiles à longue portée à l’Ukraine, le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov, a déclaré que ces commentaires «reflétaient une approche agressive adoptée par les pays baltes et la Pologne, qui sont prêts à tout faire pour provoquer une nouvelle escalade sans penser aux conséquences».

Le président français Emmanuel Macron a déclaré lundi que la France n’excluait pas d’envoyer des avions de combat en Ukraine, mais il a posé de multiples conditions avant qu’une mesure aussi importante ne soit prise.

Ces conditions, a-t-il dit, comprennent le fait de ne pas conduire à une escalade des tensions ou d’utiliser les avions «pour toucher le sol russe», et de ne pas avoir pour conséquence d’affaiblir «les capacités de l’armée française».

Il a également déclaré que l’Ukraine doit aussi demander officiellement les avions, ce qui pourrait se produire lorsque M. Reznikov s’assiéra pour des discussions à Paris.

Le chancelier allemand Olaf Scholz a semblé s’opposer à la perspective de fournir des avions de combat, suggérant dimanche que la raison de toute cette discussion pourrait être due à des «motifs de politique intérieure» dans certains pays.

Le premier ministre néerlandais Mark Rutte a déclaré lundi qu’il n’y avait «aucun tabou» dans les efforts visant à aider l’Ukraine. Mais il a ajouté que l’envoi d’avions à réaction «serait une prochaine étape très importante».

Le président de la Croatie, membre de l’OTAN, a quant à lui critiqué les pays occidentaux pour avoir fourni à l’Ukraine des chars lourds et d’autres armes. Le président Zoran Milanovic a fait valoir que ces livraisons d’armes ne feront que prolonger la guerre.

Au début du conflit, les discussions ont porté sur la possibilité de fournir à Kyiv des avions de combat MiG-29 de fabrication soviétique que les pilotes ukrainiens connaissent bien. En mars, le Pentagone a rejeté la proposition de la Pologne de transférer ses avions de combat MiG-29 à Kyiv via une base américaine en Allemagne, invoquant le risque élevé de déclencher une escalade entre la Russie et l’OTAN.

Les avions de guerre occidentaux donneraient un coup de pouce à l’Ukraine, mais contrer la force aérienne massive de la Russie resterait un défi majeur.

L’Ukraine a hérité d’une importante flotte d’avions de guerre de fabrication soviétique, notamment des avions de combat Su-27 et MiG-29 et des avions d’attaque au sol Su-25.

Le passage à des avions occidentaux nécessiterait une longue formation des équipages ukrainiens et poserait également des problèmes logistiques liés à leur maintenance et à leur réparation.

La Russie a méthodiquement ciblé les bases aériennes et les batteries de défense aérienne ukrainiennes au début du conflit, mais l’Ukraine a fait preuve d’intelligence en déplaçant ses avions de combat et en dissimulant des moyens de défense aérienne, ce qui a empêché la Russie de prendre le contrôle total du ciel.

Après avoir subi de lourdes pertes au début du conflit, l’armée de l’air russe a évité de s’aventurer profondément dans l’espace aérien ukrainien et s’est principalement concentrée sur des missions de soutien rapproché le long de la ligne de front.

L’armée de l’air ukrainienne a été confrontée à des défis similaires, essayant d’empêcher ses avions de combat restants d’être touchés par des avions de chasse et des systèmes de défense aérienne russes.