Transfert d’entreprise: quand l’étranger passe avant la famille

AFFAIRES. Vous souhaitez transférer ou racheter l’entreprise familiale et vous craignez d’avoir quelques bâtons dans les roues? Prenez votre mal en patience, parce que le gouvernement vous attend avec des troncs d’arbres…

C’est ce qu’a constaté la famille Poulin de JPM Métal de Saints-Anges. Alors que le processus de relève familiale est enclenché depuis plusieurs mois, on constate qu’il serait plus facile pour un étranger de racheter le tout.

« J’ai travaillé pendant 25 ans. C’est plaisant d’avoir de la relève, mais je trouve déplorable d’avoir autant de difficulté. Je déteste la bureaucratie. C’est paqueté des barrières! Comment intéresser ses enfants quand on a toujours des bâtons dans les roues?! », déplore Pierre Poulin, père de famille et président de l’entreprise spécialisée dans la conception et la fabrication de produits métalliques sur mesure.

Pire encore, la situation est telle qu’il serait plus avantageux de vendre leur entreprise à des investisseurs étrangers afin de limiter au minimum l’ingérence gouvernementale. Convaincu de ne pas être le seul entrepreneur dans cette situation, M. Poulin lève aujourd’hui la main afin de changer les choses.

« Je suis engagé dans ma communauté; je m’attendrais à ce que le gouvernement soit engagé envers moi. Dans les années 70, on bâtissait le Québec. Là, on est en train de le détruire complètement. On se plaint du manque de personnel, mais il y a de la perte de temps quelque part. En ce moment, on est dans le tunnel, et on ne sait pas s’il y a de la lumière au bout… »

« Il a travaillé toute sa vie, mais il ne peut pas aider ses enfants parce que le gouvernement ne veut pas perdre d’argent dans la transaction. Il y a beaucoup d’entreprises qui n’ont pas de repreneur, mais lorsqu’une entreprise a un repreneur de sa famille, c’est encore plus difficile. Beaucoup d’aide existe, mais les différents services se renvoient la balle continuellement. On ne sait plus où aller cogner. C’est lourd! C’est tellement lourd que ça décourage des entrepreneurs », a appuyé Marie-Pierre Poulin, directrice générale et l’une des repreneuses de l’entreprise familiale, en ajoutant qu’ils sont rendus à quatre rencontres avec des représentants gouvernementaux.

Caroline Poulin, directrice des finances et une autre repreneuse de JPM Métal, a appris le 15 juillet dernier que la stratégie pour sa sœur et elle consisterait à créer une nouvelle entreprise, laquelle rachèterait JPM Métal, pour enfin fusionner les deux entités.

« Ce n’est pas encourageant pour nous. C’est fâchant, parce que créer une entreprise bidon, c’est cher! Le bon sens voudrait de prioriser les gens d’ici, qui plus est la famille, qui a à cœur le succès de l’entreprise. Nous vivons un sentiment d’injustice. Il y a quelque chose qui ne tourne pas rond. […] On va passer au travers, mais frustrées. Ce ne sera pas un transfert sans embuches », dit-elle.

« C’est important de bien planifier le transfert d’entreprise et d’être accompagné par des professionnels. […] C’est très complexe, il y a beaucoup d’étapes. Il faut s’assurer que toutes les étapes soient faites dans l’ordre, dans les règles. Est-ce que notre gouvernement pourrait mettre certains allégements qui pourraient faciliter le transfert d’entreprise? Certainement », a commenté pour sa part Marie-Christine Lavoie, directrice générale de la Chambre de commerce et d’industrie Nouvelle-Beauce, en soulignant que dans les 10 prochaines années, bon nombre d’entreprises seront sur le marché…