DuBreton s’oppose au plan de retrait
AGRICULTURE. L’entreprise duBreton, dénonce le plus récent plan de retrait des producteurs de porc annoncé par les Éleveurs de porcs du Québec (EPQ), estimant que celui-ci diminuera la productivité de l’ensemble de la filière et privera les producteurs les plus productifs de revenus importants.
Les Éleveurs ont adopté, en mars dernier, de nouvelles dispositions à la suite de travaux relatifs à la réduction et au maintien de la production porcine à l’échelle provinciale qui font qu’une entreprise, dont le volume de production excède son volume maximal autorisé, s’expose à une « pénalité » sur les porcs livrés en trop, soit à une réduction de 40 % du prix régulier établi, ce que dénonce duBreton.
Avec la fermeture de certaines usines, dont celle de Vallée-Jonction, les Éleveurs de porcs avaient réussi à imposer une baisse de 9 % de la production avec l’entrée en vigueur du plan de retrait, il y a deux ans, mais non sans difficultés. Depuis l’automne dernier, les producteurs de porcs reçoivent un volume de référence, soit la capacité de leur bâtiment, et les Éleveurs espèrent que ce mécanisme stabilisera la chose, explique Louis-Philippe Roy, président des Éleveurs de porcs du Québec, qui avoue que le système connait certains ratés.
« On remarquait qu’il y avait une augmentation de la production, alors c’est pourquoi on souhaitait resserrer les normes. On détourne encore environ 1 000 porcs par semaine, alors on veut s’assurer d’une équité entre les producteurs. Certains bâtiments du territoire n’étaient plus en production depuis un certain temps et ont toutefois été rachetés par des producteurs qui les ont remis en production, ce qui est venu changer certaines données », -résume-t-il.
Un frein à de nouveaux marchés
Producteur et transformateur de porc biologique, duBreton n’en est pas à ses premières critiques envers le syndicat agricole dont elle souhaite se distancer depuis plusieurs années. En janvier 2023, l’entreprise avait exprimé son opposition au mécanisme de réduction des volumes de référence basé sur un calcul proportionnel des surplus.
Le plan mis en place empêche donc des producteurs de croître et bloque l’accès au marché pour un type de production valorisée par les consommateurs, souligne le président de duBreton, Vincent Breton, qui indique que l’entreprise est actuellement en recherche active de volumes supplémentaires pour répondre à une demande croissante de ses produits, tant au Québec qu’ailleurs en Amérique du -Nord.
« Au lieu de se réformer, on arrive avec une règle qui va pénaliser les producteurs qui sont efficaces et qui respectent les normes. Il y a un régime de peur, il n’y a presque plus de producteurs indépendants. C’est un système excessivement rigide et c’est la raison pour laquelle nous sommes débarqués de l’ASRA (assurance stabilisation du revenu agricole). Ça nous a toutefois joué un tour, pendant la Covid, puisque toute l’aide aux entreprises passait par là. »
Pour lui, les initiatives des Éleveurs de porcs ne reflètent en rien les réalités de marché actuelles. « Nos producteurs sont menacés alors que la demande pour leur type de production est en pleine croissance. C’est une démonstration flagrante que le syndicat ne représente pas convenablement les intérêts de duBreton, ni ceux de ses éleveurs partenaires. »
Louis-Philippe Roy n’est pas de cet avis, ajoutant que les pénalités ont un but précis, le respect des volumes. Le 40 % de pénalité ne servira qu’à financer les coûts de détournement des porcs à l’extérieur du Québec. « Ce n’est pas pour se monter un compte bancaire et faire des profits. Présentement, les producteurs paient pour l’ensemble des détournements. On souhaite se donner un cadre et le respecter pour entrer dans les volumes qu’on s’est donnés le plus possible, soit environ 6,4 millions de porcs par année », précise-t-il.
« Ça fait partie des choses qui se sont passées au cours des deux dernières années. Des bâtiments n’étaient plus en production depuis deux ans, mais avaient un volume de référence. Nous considérions qu’ils n’étaient plus en production, mais ils ont été rachetés par d’autres producteurs qui les ont relancés. On se retrouve dans des situations comme ça et ça nuit à l’équilibre que l’on recherche. »
Louis-Philippe Roy espère que les producteurs sauront respecter la vision transmise par le syndicat. « -Nous sommes tous des producteurs et on doit s’assurer d’avoir la même vision, car nous sommes tous dans la même situation. On ne veut plus revivre la situation de la Covid avec 100 000 ou 150 000 porcs en attente. On doit éviter de perdre le contrôle », résume-t-il.
Un litige qui perdure
DuBreton cherche à se distancer des Éleveurs de porcs depuis plusieurs mois, mais peine à obtenir gain de cause. En décembre dernier, duBreton exprimait son désaccord avec la position du syndicat qui cherchait alors à éviter la tenue d’un référendum sur sa demande d’exclusion du Plan conjoint, demande qui avait été déposée en août 2023.
« La régie avait demandé aux Éleveurs de tenir un référendum et ils ne veulent pas le faire. On pourrait avoir des surprises, s’il était tenu. On pourrait se rendre compte que la démocratie n’existe plus et que quelqu’un détient plus de 50 % des voix. Olymel a 70 % du marché. Qui représente les Éleveurs de porcs du Québec ? Est-ce des sous-groupes de l’industrie ? On a institutionnalisé l’association. C’est maintenant un groupe militant qui travaille à se maintenir en place et personne ne veut remettre ça en question », se désole Vincent Breton.
Sur les litiges constants avec l’entreprise duBreton, Louis-Philippe Roy réitère l’importance de la mise en marché collective. « Nous nous sommes mis des outils de mise en marché depuis 50 ans pour travailler tout le monde ensemble et avoir une force, une fierté et un juste prix. Nous avons 2 500 producteurs qui ont aussi une voix et pour ces gens-là, c’est important. DuBreton fait du bon travail, mais dans un monde collectif, on ne peut tout avoir. Il y a sûrement des gens qui souhaiteraient ne pas faire du conventionnel et nous en sommes conscients, alors il est sûrement possible de trouver une voie de passage, sauf que pour l’instant, nous n’avons peut-être pas la même idée », mentionne-t-il en terminant.
