Le Bourreau de la Beauce fait son mea culpa

JUSTICE. Le moment des représentations sur la peine est arrivé ce mercredi au Palais de Justice de Saint-Joseph, dans le dossier du Bourreau de la Beauce. Alors que les trois journées prévues à l’étape doivent servir à orienter le juge René De la Sablonnière dans son verdict, l’homme reconnu coupable de 47 chefs d’accusation de voies de fait, voies de fait armées, menaces de mort et agressions sexuelles a plutôt profité de l’occasion pour s’adresser à ses enfants et victimes.

Au début, l’individu de 64 ans a laissé entendre qu’alors qu’il était jeune, il a connu différents sévices dans une école de réforme montréalaise, avant de s’en évader en 1972. « Toute ma vie, je me suis senti comme un pourri. Je suis le résultat de ce qu’on a fait de moi. », a-t-il prononcé, en soulevant qu’avoir toujours besoin des autres tout en se renfermant sur lui-même (il reconnaissait le paradoxe) font partie de ses séquelles.

Selon ses dires pleinement conscient du mal qu’il a fait, il a ensuite indiqué être tourmenté, mais que l’emprisonnement ne l’aidait pas à réparer les erreurs du passé. Dans le même ordre d’idées, il a soulevé que ses études de la bible et de la Torah, de même que son désir de redonner à la société par son enseignement sont « tout ce qu’il lui reste ».

« Quand les policiers m’ont arrêté, j’ai dit: “enfin”. […] Si j’avais la certitude que ça pouvait guérir mes enfants, je voudrais, M. le juge, que vous m’envoyer en prison pour le restant de mes jours. Je les aime mes enfants. Je les aime au point de disparaître. Je n’étais peut-être pas dû pour être un père. Je suis fier d’eux autres, de ce qu’ils sont devenus, même si ce n’est pas grâce à moi. Je donnerais ma vie pour que tout soit correct », a-t-il lancé.

Il a poursuivi son envolée en tournant son regard vers ses enfants. « Ça fait trois ans que je suis en prison et ça, croyez-le, croyez-le pas, tous les soirs je prie pour vous autres. Vous êtes merveilleux. » À ces mots, un de ses fils a quitté la salle.

Mauvais souvenirs

Sur la dizaine de ses victimes, six ont souhaité parler à la cour des conséquences de ses abus et violences du passé dans leur vie d’adulte. Notamment, plusieurs ont développé des phobies, ont consommé de l’alcool ou des drogues, ont perdu toutes confiances envers autrui, ou ont tenté de mettre fin à leurs jours.

« Je ne suis pas désolé (de le voir en prison). Sous son toit, il était strictement interdit d’avoir de la confiance en soi. À force de vouloir de prendre pour Dieu, pour moi, tu étais le démon. C’est un pervers narcissique. Tous mes souvenirs d’enfance sont dénaturés par la cruauté de mon père. Je serai sans doute épouvanté par mon père pour le reste de ma vie. J’aurai à vivre avec des chaînes invisibles qui vont m’entraver pour le reste de mon existence. Je suis presque devenu fou. Si on me demandait pour combien de temps cet homme devrait passer derrière les barreaux, je répondrais: “pour toujours” », ont-ils déclaré.

Venue à sa défense, son épouse actuelle, avec qui il a partagé les 23 dernières années de sa vie au Nouveau-Brunswick, l’a qualifié de « l’homme le plus gentil que je n’avais jamais vu ».

À son avis, son conjoint n’est absolument pas celui que les enfants ont décrit dans leurs témoignages. « Ça fait plus de 20 ans qu’il porte le fardeau de ce qu’il a fait dans son passé. C’est un homme bien. […] Si j’avais le moindre soupçon que cet homme est violent, pensez-vous que je l’attendrais encore? », a-t-elle commenté, en prononçant le souhait de recommencer à vivre normalement.

Pour sa part, le procureur de la couronne Nicolas Champoux entend demander à ce que l’homme n’ait aucune possibilité de libération conditionnelle avant la moitié de sa peine, ou 10 ans. Les discussions reprendront demain.