Bois de quatre pieds: le dernier voyage d’un vieux routier

SAINT-ISIDORE. Le marché évoluant, d’ici quelques semaines, le commerce du bois de quatre pieds (communément appelé la « pitoune ») prendra fin. C’est ainsi que le 7 novembre dernier, après plus de 48 ans de carrière, le transporteur Denis Royer, 73 ans de Saint-Isidore, a effectué son dernier voyage.

« J’ai fait ce métier-là avec plaisir », est satisfait M. Royer, les yeux tournés vers le passé.

La tête remplie de bons souvenirs, l’Isidorois a raconté qu’à une autre époque, une dizaine de moulins au Québec demandaient des pitounes, et ce, pour un prix qui a atteint les 128 $ la corde il y a 20 ans. Il faisait alors deux voyages par semaine. « C’était un des transports les plus payants! »

Aujourd’hui, l’unique acheteur, la scierie Kruger de Trois-Rivières, se procure la matière première pour environ 80 $ la corde. Qui plus est, Denis Royer n’a réalisé que deux voyages dans les six derniers mois.

Quelques-unes des dernières pitounes qui sont parties pour la scierie Kruger de Trois-Rivières.

« C’est le quatre pieds qui a nourri mes enfants », est-il nostalgique. Bien qu’il était vraisemblablement de très bonne humeur mercredi dernier, M. Royer devine qu’il aura certainement « le cœur gros » sur le chemin du retour.

Par ailleurs, si le marché s’est transformé, le Beauceron est d’avis que les jeunes camionneurs ont tout autant métamorphosé la profession: vitres teintées, personnalités renfermées, et la tête toujours rivée sur leur téléphone intelligent. Ce faisant, l’ambiance auparavant très vivante dans les restaurants fréquentés par les routiers n’est plus ce qu’elle était.

Dans un autre ordre d’idées, coïncidence, il a connu son unique blessure en carrière l’été dernier, alors qu’il a reçu une bûche sur la tête.

Réal Turgeon et Denis Royer.

« C’est la fin d’une ère… », a lancé Réal Turgeon, maire de Saint-Isidore. Il faut savoir que M. le maire connaît M. Royer depuis sa plus tendre enfance. Ayant comme passe-temps de travailler le bois de quatre pieds, il avait pris l’habitude de réquisitionner les services de son vieil ami.

L’an prochain, Denis Royer pense transporter « autres choses » avec son camion, des billots probablement. Mais, il est fort possible que 2019 soit sa dernière année de travail.

Denis Royer, chargeant son camion pour la dernière fois.